Il y a quelques années, j’ai arrêté de manger de la viande. Comme beaucoup, j’étais marqué par les images diffusées par L214 : des vaches entassées, des abattoirs inhumains. J’étais écœuré. Comment la recherche de rentabilité a-t-elle pu pousser l’homme à imaginer de telles atrocités ?
Je critique souvent les réseaux sociaux, qui remplacent parfois les vraies émotions par des scrolls rapides. Mais il faut leur reconnaître une force : celle de réveiller les consciences. Sans eux, le scandale des élevages intensifs n’aurait peut-être jamais éclaté.
Le problème, c’est que les images chocs ont tout envahi. On ne voit plus que l’horreur. Les médias préfèrent le scandale à la beauté. Ils montrent la barbarie, mais oublient la dignité.
Un jour, François Lemière m’a invité dans sa ferme. J’y ai découvert une autre réalité. Ses vaches avaient un nom. Chacune, une histoire. Il parlait de son troupeau comme d’une famille. Alors j’ai compris : derrière la viande, il y a d’abord une relation.
Et François n’est pas une exception. Avec Nicolas, notre créateur de contenu, nous avons parcouru quinze fermes partenaires la semaine dernière. Nous sommes revenus avec des images, mais surtout avec des histoires. Celles qui se lisent dans les yeux pétillants des éleveurs lorsqu’ils parlent de leurs animaux.
Guy Leplè nous a entraînés sur des kilomètres de prairie, fier de montrer l’herbe qui nourrit son troupeau. M. Paris a sorti une vieille photo de sa première génisse : il avait 15 ans. Cinquante-cinq ans plus tard, il prend toujours soin de ses “filles” et de leurs descendances. Jean-Charles Thibaut mélange ses Angus avec ses chevaux de course. « Elles mangent ce que les purs-sangs laissent, comme ça chacun trouve sa place », m’a-t-il dit avec un sourire de cow-boy. Et puis il y a Hervé Chantepie, qui a insisté pour nous faire goûter son calva de 40 ans d’âge à 10h du matin. J’aurais préféré un café, mais impossible de refuser. Je l’ai regretté toute la journée.
Chaque rencontre m’a rappelé que l’agriculture, dans son essence, n’est pas une industrie. C’est une histoire de passion, de patience et de transmission. C’est pour cette raison que j’ai invité une dizaine d’influenceurs à rencontrer ces éleveurs. Ils sont repartis bouleversés. Non pas par la violence, mais par la beauté. Par la simplicité de ces vies dédiées au soin du Vivant.
Nous n’avons rien caché. Parce qu’il n’y avait rien à cacher. En ville, on porte souvent des masques, on ajuste notre personnalité pour coller aux attentes des autres. Mais ces hommes sont comme nos produits : bruts, sincères et authentiques. Ça fait du bien. C’est inspirant.
Voilà la vraie révolution agricole : celle qui nourrit sans détruire et qui redonne à l’homme sa juste place dans le Vivant.